Le draps ne couvrait qu'à demi le dos de la blonde, éclairé par les doux rayons du soleil. Le tableau était cinématographique, elle s'étirant langoureusement, le nez dans les coussins, et lui se rhabillant à la hâte. Il n'était qu'une conquête de plus, bien que ce soit la deuxième fois qu'ils se retrouvent dans cette situation.. se pourrait-il qu'il finisse amant régulier ? Non, la belle n'a pas vraiment de régulier. Elle aime le plaisir mais refuse l'attachement, dés lors, impossible de laisser entre dans son univers un homme, régulièrement. Elle fait mine d'être encore assoupie, lui laissant le loisir de s'en aller comme si de rien n'était. Une nuit de plus partagée et leurs chemins se séparent. Le monde est en crise mais elle ne veut pas le voir. Colonisation de sa planète qu'elle désire ignorer le plus longtemps possible, se mêlant à la population comme si de rien n'était. Du haut de ses vingt ans, elle n'était pas prête à accepter que son univers s'étiole, et c'était peut-être mieux ainsi.. sa soeur était plus responsable, du genre à préparer des vivres dans le but de fuir. Les Rosebury savaient parfaitement où se trouvait le danger, seule leur cadette était incapable de se raisonner, préférant la compagnie masculine, au risque de se faire attraper. « Tu as vu l'heure qu'il est ? Nous devrions déjà être partis, et toi, tu ramènes un inconnu sous notre toit ? Mais qu'as-tu donc dans la tête ? » Elle venait de descendre dans le salon, vêtue d'une nuisette bleutée, les cheveux tombant hasardeusement sur ses épaules, le visage encore empreint des plaisirs de la veille. « Ca va, c'pas la fin du monde non plus. » Un baîllement et un bol de céréale plus tard, elle s'installait à table, sous le regard de merlans frits de sa soeur et ses parents. « Non, bien sûr.. c'est juste la fin de l'humanité mais mademoiselle s'en fiche ! » L'exaspération de l'autre blonde était à son comble et le calme imperturbable de la croqueuse de céréales – et pas que – ne faisait qu'augmenter la tension ambiante. « Partez, moi j'viens pas. »

Asphodèle ne comprenait pas les réactions de ce corps, elle ne comprenait pas non plus le regard que son hôte avait longtemps posé sur ce qui était nommé 'hommes'. Qu'avait-elle à les dévorer de la sorte et à infliger à son esprit des pensées incompréhensibles ? Parfois même, il y avait une sorte de souvenir, lorsqu'elle en reconnaissait un et malgré tous ses efforts, l'âme ne parvenait ni à les lire intégralement, ni à les interpréter. Comme à son habitude, elle prenait le soleil, adoratrice de cet astre lumineux. La chaleur sur la peau était une douceur incomparable, un bonheur ultime, n'en connaissant surtout pas de plus forts.. il fallait dire qu'entre Eurydice et Asphodèle, il y avait un monde. « Tu savais pourtant qu'il arriverait, le jour où je reprendrais ce qui m'appartient. » Leçon donnée à celle qui se croyait plus forte. Les doigts remuèrent différemment et l'enveloppe charnelle posée sagement sur un banc finit par se mouvoir avec l'attitude féline correspondant à l'occupante originelle. « Tu n'as pas le droit de faire ça, Eury'. Ils t'arrêteront. » Le sourire en coin fut la seule réponse. Rejoindre les autres lui était impossible, elle en avait conscience, mais elle n'allait pas se gêner pour retrouver les loisirs du passé. Asphodèle succomberait, il n'y avait pas d'autres options. Miss Rosebury avait toujours eu le mental d'une battante, si têtue, si bornée, que rien ne lui résistait jamais. Insouciante disait-on d'elle. Certes, mais elle avait pris la mesure de ce qu'il se passait. Si elle devait y laisser sa peau, ce serait après un combat acharné, et elle éradiquerait quelques représentants de cette race d'ovnis sans sourciller. Pas de violence physique mais de la destruction de principes. Pervertir pour mieux provoquer la chute. Ils ne connaissaient rien, ils étaient tous cette insupportable pureté qui prônait des idéaux erronés. Qui pouvait être heureux prisonniers de limites, de barrières à chaque pas ? Oui, l'humanité pouvait être pourrie jusqu'à la moelle, souvent violente et vénale, cela ne l'empêchait pas d'avoir de bons côtés, et aux yeux de l'humaine, la seule chose qui permettait d'apprécier la douce saveur du bonheur restait la tristesse et les douleurs. Asphodèle l'apprendrait à ses dépend.